Le site du Monde a publié hier une entrevue avec Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture. Cette dernière est bien entendu revenue sur le budget du ministère et sur certains sujets chauds du moment qui font beaucoup parler (Hadopi, Maison de l'Histoire de France, etc.). Mais elle a également parlé d'archives.
La première information, plutôt rassurante, est que malgré la crise, qualifiée d’"inouïe" par la ministre, elle ne remettra pas en cause les projets culturels déjà engagés, parmi lesquels figure le nouveau centre des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine. La ministre a également eu un mot à destination des collectivités territoriales en affirmant que les AD du Tarn avaient fait 65 millions de pages vues sur son site internet l'année suivant la mise en ligne d'archives numérisées. La ministre a donc visiblement été marquée par sa visite dans ce centre d'archives cet été.
La ministre a ensuite affirmé qu'elle et ses équipes travaillaient sur une loi comportant trois volets. Le premier concerne les règles d'aménagement urbain, le deuxième concerne l'archéologie préventive et le troisième les archives :
« Enfin, le dernier volet devrait concerner les archives. Le précédent gouvernement avait créé une catégorie d'archives incommunicables, concernant notamment les armes nucléaires, bactériologiques... C'est contraire à la notion même d'archives. Certains délais nécessaires avant consultation avaient été étendus. Il faudra revoir ça. Nicolas Sarkozy voulait instrumentaliser l'histoire. François Hollande veut rendre aux historiens les outils de leur indépendance ».
Pour rappel, voici ce que dit le Code du Patrimoine dans son article L213-2 :
« Ne peuvent être consultées les archives publiques dont la
communication est susceptible d'entraîner la diffusion d'informations
permettant de concevoir, fabriquer, utiliser ou localiser des armes
nucléaires, biologiques, chimiques ou toutes autres armes ayant des
effets directs ou indirects de destruction d'un niveau analogue ».
A l'époque du vote de la loi, cette mesure avait provoqué un débat dans la communauté des archivistes, qui se voit donc aujourd'hui ranimé. La ministre est restée vague sur les détails de ce projet de loi, et on ne sait pas, par exemple, ce qu'il faudrait revoir selon elle. En tout cas, bouleverser maintenant la loi sur les archives alors que certains services commençaient juste à réorganiser leurs fonds en fonction des "nouveaux" délais de communicabilité introduits par la loi de 2008 ne va pas aller sans poser de problèmes ! A cela, il va falloir ajouter la mise à jour des instruments de recherche existants et le reparamétrage de tous les logiciels de gestion documentaire...
Si
l’accès aux
archives publiques est un droit, que l'on pourrait qualifier
d'inaliénable pour les citoyens, l'accès aux archives concernant les
armes de destruction massive n'est pas non plus une atteinte à ces
droits, travailler sur l'arme atomique ou la dissuasion nucléaire ne
nécessitant pas forcément d'avoir accès à des connaissances sur les
techniques de physique nucléaire. Pour ma part, je ne suis pas contre le côté incommunicable de certaines archives liées aux armes de destruction massive, du moment que l'on ne fait pas une application stricte de ce principe. A titre d'exemple, il est normal qu'un témoignage de technicien ayant travaillé sur l'arme nucléaire puisse être accessible aux chercheurs, sans pour autant que ces derniers aient accès aux documents d'archives produits par lui.
Au final, la seule alternative à l'incommunicabilité des archives est l’introduction de longs délais, éventuellement révisables. Mais réviser des délais périodiquement sur une période longue de centaines d'années ne revient-il pas à ne pas communiquer des archives ?
Bonjour,
RépondreSupprimerDès lors que les informations sont obsolètes au niveau Défense Nationale depuis disons 10 ans quel intérêt y-a-t-il à bloquer le communication?
Tous ces documents devraient être directement aux AN et nulle part ailleurs on serait déjà un peu plus sûr que la même règle s'applique à tous.
Les sites nucléaires civils ont sait où ils sont donc pourquoi les cacher? Absurde.
Les lieux de stockage des armes nucléaires sont déjà beaucoup moins connus et là une libération des données concernant un site désaffecté depuis 30 ans (pe) ne peut en aucun cas gêné le pourquoi la protection avait été mise, donc protection pipot!
Par contre le mode d'emploi pour faire la bombe, là oui la protection peut être quasi permanente.
Amitiés
Les documents concernant la Défense n'iront jamais aux AN car ils sont conservés par le Service Historique de la Défense à Vincennes.
RépondreSupprimerLe Code du patrimoine ne parle pas du nucléaire civil, mais comme c'est précisé dans l'article, des archives publiques [...] permettant de concevoir, fabriquer, utiliser ou localiser des armes nucléaires, biologiques, chimiques. Il n'y a aucune mesure d’incommunicabilité concernant la localisation des sites nucléaires civils.
Enfin, il n'existe pas un "petit guide pratique pour fabriquer une bombe nucléaire"... Une information concernant la dissuasion nucléaire ne devient pas obsolète au bout de dix ans. Il y a tout un tas de pays/organisations qui seraient très contents de pouvoir mettre la main sur nos plans de fabrication d'il y a 30 ans, même s'ils sont pour nous obsolètes.